Title: "Relever l’esprit public en province". Convergences polémiques entre George Sand et Claude Tillier
Author, co-author: Saintes, Laetitia
Abstract: Premier texte ouvertement politique de George Sand, Fanchette, lettre de Blaise Bonnin à Claude Germain paraît en 1843 dans La Revue indépendante, publication qu’elle a cofondée avec Louis Viardot et Pierre Leroux. Or la brochure a peiné à trouver preneur : la frilosité des imprimeurs locaux, jointe à l’hostilité du ministériel Journal de l’Indre, achèvent de convaincre Sand de fonder un périodique répondant au « besoin de relever l’esprit public en province, et de le mettre sur un pied, non de rivalité, mais d’égalité avec celui de la métropole ». Ce sera L’Éclaireur de l’Indre, journal des départements de l’Indre, du Cher et de la Creuse, lancé en septembre 1844. Envisageant les « petites villes » comme des « antres de corruption, où l’intimidation assure l’impunité au vice et au crime tout autant qu’à Paris le mystère », Sand développe dans les écrits polémiques qu’elle publie dès lors et jusqu’à 1851 un propos proche, sur le plan thématique comme sur le plan rhétorique, de celui de Claude Tillier, pamphlétaire du Nivernais voisin qu’elle cite parfois textuellement. Cofondateur en 1831 de L’Indépendant de Clamecy, périodique républicain, Tillier a rejoint en 1841 les rangs de L’Association, journal de la Nièvre, feuille d’opposition dont il devient bientôt l’un des principaux rédacteurs. Ayant lui aussi à lutter contre la presse ministérielle – dont L’Écho de la Nièvre, organe de la préfecture – et contre l’hostilité affichée des notables locaux, peinant de ce fait à trouver un imprimeur acceptant de publier ses pamphlets, Tillier, républicain revendiqué, n’en défend pas moins dans ce journal comme dans ses pamphlets un propos progressiste où l’idée de justice sociale occupe une place centrale, à l’opposé du libéralisme économique et social débridé qui caractérise la monarchie de Juillet. Le geste polémique de Tillier comme celui de Sand donnent à penser sur la possibilité d’une parole polémique et plus avant sur ses modalités sous le régime de Juillet. Les deux écrivains affrontent, en effet, des réalités différentes. Alors que Tillier, relativement méconnu hors du Nivernais, cherche à faire connaître son œuvre dans la capitale, Sand, écrivaine déjà fameuse, doit pour sa part affronter l’esprit du temps, hostile aux incursions des femmes en terre polémique. Cela conditionne fortement la forme que prennent leurs paroles polémiques respectives, depuis leur support (de l’article de journal à la brochure) jusqu’aux modalités rhétoriques et esthétiques. Aussi cette contribution entend-elle éclairer un aspect méconnu de l’œuvre de Sand et faire redécouvrir celle de Tillier en les étudiant sous divers angles ; on envisagera d’abord les supports de leur propos polémique avant de se pencher sur les thématiques qui leur sont communes. On établira ensuite l’horizon idéologique présidant à ces productions destinées à « relever l’esprit public en province » en y défendant les idées républicaines et socialistes, avant d’étudier les modalités rhétoriques de ces deux œuvres polémiques représentatives de l’esprit du temps.
Author, co-author: Saintes, Laetitia
Abstract: Premier texte ouvertement politique de George Sand, Fanchette, lettre de Blaise Bonnin à Claude Germain paraît en 1843 dans La Revue indépendante, publication qu’elle a cofondée avec Louis Viardot et Pierre Leroux. Or la brochure a peiné à trouver preneur : la frilosité des imprimeurs locaux, jointe à l’hostilité du ministériel Journal de l’Indre, achèvent de convaincre Sand de fonder un périodique répondant au « besoin de relever l’esprit public en province, et de le mettre sur un pied, non de rivalité, mais d’égalité avec celui de la métropole ». Ce sera L’Éclaireur de l’Indre, journal des départements de l’Indre, du Cher et de la Creuse, lancé en septembre 1844. Envisageant les « petites villes » comme des « antres de corruption, où l’intimidation assure l’impunité au vice et au crime tout autant qu’à Paris le mystère », Sand développe dans les écrits polémiques qu’elle publie dès lors et jusqu’à 1851 un propos proche, sur le plan thématique comme sur le plan rhétorique, de celui de Claude Tillier, pamphlétaire du Nivernais voisin qu’elle cite parfois textuellement. Cofondateur en 1831 de L’Indépendant de Clamecy, périodique républicain, Tillier a rejoint en 1841 les rangs de L’Association, journal de la Nièvre, feuille d’opposition dont il devient bientôt l’un des principaux rédacteurs. Ayant lui aussi à lutter contre la presse ministérielle – dont L’Écho de la Nièvre, organe de la préfecture – et contre l’hostilité affichée des notables locaux, peinant de ce fait à trouver un imprimeur acceptant de publier ses pamphlets, Tillier, républicain revendiqué, n’en défend pas moins dans ce journal comme dans ses pamphlets un propos progressiste où l’idée de justice sociale occupe une place centrale, à l’opposé du libéralisme économique et social débridé qui caractérise la monarchie de Juillet. Le geste polémique de Tillier comme celui de Sand donnent à penser sur la possibilité d’une parole polémique et plus avant sur ses modalités sous le régime de Juillet. Les deux écrivains affrontent, en effet, des réalités différentes. Alors que Tillier, relativement méconnu hors du Nivernais, cherche à faire connaître son œuvre dans la capitale, Sand, écrivaine déjà fameuse, doit pour sa part affronter l’esprit du temps, hostile aux incursions des femmes en terre polémique. Cela conditionne fortement la forme que prennent leurs paroles polémiques respectives, depuis leur support (de l’article de journal à la brochure) jusqu’aux modalités rhétoriques et esthétiques. Aussi cette contribution entend-elle éclairer un aspect méconnu de l’œuvre de Sand et faire redécouvrir celle de Tillier en les étudiant sous divers angles ; on envisagera d’abord les supports de leur propos polémique avant de se pencher sur les thématiques qui leur sont communes. On établira ensuite l’horizon idéologique présidant à ces productions destinées à « relever l’esprit public en province » en y défendant les idées républicaines et socialistes, avant d’étudier les modalités rhétoriques de ces deux œuvres polémiques représentatives de l’esprit du temps.