Title: D’une marginalité l’autre. Modalités du polémique dans la parole sur l’exil et la proscription de Benjamin Constant et Germaine de Staël
Author, co-author: Saintes, Laetitia
Abstract: Paru en février 1814, De l’esprit de conquête et de l’usurpation est signé « Benjamin de Constant-Rebecque, membre du Tribunat, éliminé en 1802 », manière pour l’écrivain de se poser d’emblée comme un marginal, un exclu de la scène politique impériale. Quelques mois après la mort de l’Empereur déchu paraît Dix années d’exil, ouvrage protéiforme qui voit Germaine de Staël revendiquer, non sans véhémence, son statut de paria aux yeux du pouvoir napoléonien. Trente ans et deux révolutions plus tard, Victor Hugo, fraîchement exilé, donne toute la mesure de son dégoût pour le Second Empire dans Les Châtiments, jouant notamment, pour ce faire, sur le mode pamphlétaire. Pour ces figures d’écrivains exilés ou bannis – fût-ce simplement d’une institution comme le Tribunat –, la persécution exercée par le pouvoir et l’ostracisation qui en résulte, loin d’être dissimulées, sont au contraire exhibées, la rupture revendiquée avec un régime considéré comme illégitime, inique et mensonger. Rupture d’autant plus revendiquée qu’elle s’énonce dans le registre ou le genre pamphlétaire, marginaux par excellence. Tant l’exclusion de Constant, arborée avec fierté, que l’exil de Germaine de Staël et d’Hugo, vécu souvent avec un stoïcisme teinté d’orgueil, choisissent le mode pamphlétaire pour s’exprimer. Loin d’être anodin, ce choix est révélateur de leur volonté de refléter dans l’espace du texte, par le genre ou le registre choisi, la position marginale qui est la leur dans le corps social et politique français : c’est en effet dans un genre ou un registre alternatifs, résolument à part, que bannis et exilés choisissent de dire la précarité et le paradoxe inhérents à leur propre position. À la lumière des écrits précités, nous chercherons à mettre au jour la manière spécifique dont le pamphlet – comme registre ou comme genre, en prose ou en poésie – reflète la volonté de rupture professée par ces figures de l’exil et du bannissement, désir qui ne pourrait trouver à s’exprimer de la même façon dans aucun autre genre. Dans cette perspective, il s’agira entre autres de montrer comment l’écriture pamphlétaire permet comme nulle autre de transfigurer, de sublimer l’indignation du proscrit – laquelle, hissée au rang de sainte colère, permet de faire de son exclusion le signe de son élection.
Author, co-author: Saintes, Laetitia
Abstract: Paru en février 1814, De l’esprit de conquête et de l’usurpation est signé « Benjamin de Constant-Rebecque, membre du Tribunat, éliminé en 1802 », manière pour l’écrivain de se poser d’emblée comme un marginal, un exclu de la scène politique impériale. Quelques mois après la mort de l’Empereur déchu paraît Dix années d’exil, ouvrage protéiforme qui voit Germaine de Staël revendiquer, non sans véhémence, son statut de paria aux yeux du pouvoir napoléonien. Trente ans et deux révolutions plus tard, Victor Hugo, fraîchement exilé, donne toute la mesure de son dégoût pour le Second Empire dans Les Châtiments, jouant notamment, pour ce faire, sur le mode pamphlétaire. Pour ces figures d’écrivains exilés ou bannis – fût-ce simplement d’une institution comme le Tribunat –, la persécution exercée par le pouvoir et l’ostracisation qui en résulte, loin d’être dissimulées, sont au contraire exhibées, la rupture revendiquée avec un régime considéré comme illégitime, inique et mensonger. Rupture d’autant plus revendiquée qu’elle s’énonce dans le registre ou le genre pamphlétaire, marginaux par excellence. Tant l’exclusion de Constant, arborée avec fierté, que l’exil de Germaine de Staël et d’Hugo, vécu souvent avec un stoïcisme teinté d’orgueil, choisissent le mode pamphlétaire pour s’exprimer. Loin d’être anodin, ce choix est révélateur de leur volonté de refléter dans l’espace du texte, par le genre ou le registre choisi, la position marginale qui est la leur dans le corps social et politique français : c’est en effet dans un genre ou un registre alternatifs, résolument à part, que bannis et exilés choisissent de dire la précarité et le paradoxe inhérents à leur propre position. À la lumière des écrits précités, nous chercherons à mettre au jour la manière spécifique dont le pamphlet – comme registre ou comme genre, en prose ou en poésie – reflète la volonté de rupture professée par ces figures de l’exil et du bannissement, désir qui ne pourrait trouver à s’exprimer de la même façon dans aucun autre genre. Dans cette perspective, il s’agira entre autres de montrer comment l’écriture pamphlétaire permet comme nulle autre de transfigurer, de sublimer l’indignation du proscrit – laquelle, hissée au rang de sainte colère, permet de faire de son exclusion le signe de son élection.